Joseph Garrigue est l’ancien conservateur de la Réserve Naturelle Nationale « Forêt de la Massane« , une forêt inscrite au patrimoine mondial de l’humanité. Joseph Garrigue a, par ailleurs, visité il y a peu de temps la forêt et le sentier des îles de Bonny-sur-Loire où à eu lieu la coupe rase contre laquelle nous avons lancé une pétition. Voici son travail d’expertise :
Au vu des éléments régissant les milieux naturels et les espèces présentes ainsi qu’au constat fait sur place, il s’avère que les coupes réalisées à cette saison ont entraîné la destruction d’habitats et d’espèces protégées et sont de ce fait illégales et devraient faire l’objet d’un dépôt de plainte pour destruction d’espèces et d’habitats protégés (cf textes régissant la protection de l’environnement ci-dessous).
En effet, la désignation cadastrale de « plantation » seule ne tient pas au constat réalisé sur place avec la présence de nombreuses espèces spontanées comme le chêne, les saules, les ormes et nombreuses autres essences présentes. La photo illustrant les coupes sur la pétition mise en ligne est tout à fait explicite sur ce point et montre clairement des boisements mixtes et diversifiés. On n’est donc pas sous le coup des autorisations possibles pour une plantation exclusive de peupliers mais bien en partie dans des boisements mixtes qui ont prévalu à la désignation d’une ZNIEFF, d’une ZPS et d’une ZSC (Natura 2000).
A cette saison de nombreuses espèces d’oiseaux nichent encore sur ce site, que ce soit le Loriot d’Europe, qui affectionne particulièrement les peupleraies. Les peuplements matures, comme il est précisé, abritent bien d’autres espèces comme les pics notamment épeichette et épeiche, sittelle torchepot, grimpereau des jardins, cortège de mésanges, etc, et pour beaucoup d’entre elles, la nidification n’est pas terminée soit parce qu’elles nichent tardivement, soit qu’elles entament une seconde nichée. Les coupes ont entraîné la destruction directe des nids, des œufs ou des poussins qu’ils contiennent.
De manière indirecte, les coupes rases ont aussi entraîné la destruction des espèces présentes de sous-bois qui nichent à cette saison, comme le troglodyte, le merle, les fauvettes, les pouillots, etc.
De ce simple constat, les coupes sont illégales et tombent sous le coup de la loi par les textes rappelés ci-après.
Le fait que cette zone soit également classée à différents titres Natura 2000 (ZSC pour les oiseaux et ZPS pour les habitats) oblige à des mesures de protection supplémentaires inhérentes au classement et au vu du document d’objectif réalisé. L’art 6 de la directive faune-flore, stipule : « La mise en place d’un régime d’évaluation des incidences de toute intervention sur le milieu susceptible d’avoir un effet dommageable sur le patrimoine naturel d’intérêt européen à l’origine de la désignation de ces sites et plus globalement sur l’intégrité de ces sites ». On est bien dans ce cas de figure avec ces travaux et leur autorisation aurait dû faire l’objet d’une étude d’incidence qui aurait invariablement reporté les travaux, si autorisés, à une saison moins dommageable pour les milieux et leurs espèces comme préconisée dans le Docob en vigueur qui stipule de « favoriser la libre évolution » donc pas de coupes, et en cas de travaux à minima :
« proscrire les coupes rases » et « pas de travaux du 1er mars au 31 juillet ».
Sans cette évaluation des incidences, les coupes rases effectuées à cette saison sur les boisements de ripisylve ayant conduit à la désignation en ZPS, ont entraîné leur destruction et sont illégales et tombent sous le coup de la loi, car les boisements coupés ne sont pas de la peupleraie en plantation exclusive.
Une analyse plus fine menée par cette étude d’incidence aurait montré l’importance de ne pas faire de coupes à cette saison, que ce soit pour une plantation exclusive de peupliers ou pas, qui contreviennent à la conservation des enjeux ayant prévalus à la désignation de cette zone de protection. La coupe rase supprime évidemment l’ensemble des éléments patrimoniaux, mais a des répercussions importantes sur les zones adjacentes. Une coupe en cette saison, va attirer une grande partie des espèces des cortèges saproxyliques pour la plupart d’entre eux à l’état adulte, qui viennent pondre sur les grumes fraîchement coupées très attractives, entraînant de fait, une baisse importante des espèces à l’avenir sur les autres parcelles adjacentes, notamment celles gérées en libre évolution par le CEN.
Pour un futur plus désirable et soucieux de la préservation des écosystèmes et de la nature en général, cette parcelle aurait pu faire l’objet d’un rachat de la coupe, ou d’un contrat natura 2000 pour des îlots de vieillissement. Le mal est en partie fait, et sur ces zones les préconisations devraient être la libre évolution et non la replantation qui conduira dans une trentaine d’années au même massacre.
En conclusion, les travaux doivent être immédiatement arrêtés et faire l’objet d’une procédure judiciaire pour destruction d’espèces et d’habitats protégés.
Joseph Garrigue
Ancien conservateur de la RNN de la Massane
RAPPELS DE QUELQUES TEXTES EN VIGUEUR SUR LA PROTECTION DES ESPÈCES ET DES HABITATS.
En France, la protection des oiseaux et de leurs habitats est fixée par l’arrêté du 29 octobre 2009 qui fixe la liste des oiseaux protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection, ainsi que par les articles L. 411-1 à L. 412-1 et R. 411-1 à R. 412-7du code de l’environnement (CE).
L’arrêté du 29 octobre 2009, stipule notamment dans ses articles :
I. ― Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps :
― la destruction intentionnelle ou l’enlèvement des œufs et des nids ;
― la destruction, la mutilation intentionnelles, la capture ou l’enlèvement des oiseaux dans le milieu naturel ;
― la perturbation intentionnelle des oiseaux, notamment pendant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation remette en cause le bon accomplissement des cycles biologiques de l’espèce considérée.
― la destruction intentionnelle ou l’enlèvement des œufs et des nids ;
― la destruction, la mutilation intentionnelles, la capture ou l’enlèvement des oiseaux dans le milieu naturel ;
― la perturbation intentionnelle des oiseaux, notamment pendant la période de reproduction et de dépendance, pour autant que la perturbation remette en cause le bon accomplissement des cycles biologiques de l’espèce considérée.
II. ― Sont interdites sur les parties du territoire métropolitain où l’espèce est présente ainsi que dans l’aire de déplacement naturel des noyaux de populations existants la destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Ces interdictions s’appliquent aux éléments physiques ou biologiques réputés nécessaires à la reproduction ou au repos de l’espèce considérée, aussi longtemps qu’ils sont effectivement utilisés ou utilisables au cours des cycles successifs de reproduction ou de repos de cette espèce et pour autant que la destruction, l’altération ou la dégradation remette en cause le bon accomplissement de ces cycles biologiques.
Les articles du CE L.411-1 à 412-1 et R. 411-1 à R. 412-7 explicitent l’obligation légale et réglementaire de protection des espèces protégées et de leurs habitats.
I. – Lorsqu’un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l’écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation de sites d’intérêt géologique, d’habitats naturels, d’espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats, sont interdits :
1° La destruction ou l’enlèvement des oeufs ou des nids, la mutilation, la destruction, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d’animaux de ces espèces ou, qu’ils soient vivants ou morts, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur détention, leur mise en vente, leur vente ou leur achat ;
2° La destruction, la coupe, la mutilation, l’arrachage, la cueillette ou l’enlèvement de végétaux de ces espèces, de leurs fructifications ou de toute autre forme prise par ces espèces au cours de leur cycle biologique, leur transport, leur colportage, leur utilisation, leur mise en vente, leur vente ou leur achat, la détention de spécimens prélevés dans le milieu naturel ;
3° La destruction, l’altération ou la dégradation de ces habitats naturels ou de ces habitats d’espèces ;
Pour les zones classées au titre de Natura 2000, des mesures spécifiques viennent renforcer ce dispositif de protection des espèces et des habitats.
Directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages
Article 3
1. Un réseau écologique européen cohérent de zones spéciales de conservation, dénommé « Natura 2000 », est constitué. Ce réseau, formé par des sites abritant des types d’habitats naturels figurant à l’annexe I et des habitats des espèces figurant à l’annexe II, doit assurer le maintien ou, le cas échéant, le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des types d’habitats naturels et des habitats d’espèces concernés dans leur aire de répartition naturelle.
Plus spécifiquement pour les oiseaux, le réseau Natura 2000 comprend également les zones de protection spéciale classées par les États membres en vertu des dispositions de la directive 79/409/CEE.
Avec la constitution du réseau Natura 2000, l’Europe s’est lancée dans la réalisation d’un ambitieux réseau de sites écologiques dont les deux objectifs sont la préservation de la diversité biologique et la valorisation du patrimoine naturel de nos territoires.
Deux textes européens établissent la base réglementaire de ce réseau écologique européen Natura 2000 :
Deux textes européens établissent la base réglementaire de ce réseau écologique européen Natura 2000 :
Directive 92/43/CEE du Conseil du 21 mai 1992 dite directive « Habitats »,
concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ; elle établit un cadre pour les actions communautaires de conservation d’espèces de faune et de flore sauvages ainsi que de leur habitat. Cette directive répertorie plus de 200 types d’habitats naturels, 200 espèces animales et 500 espèces végétales présentant un intérêt communautaire et nécessitant une protection. Directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 dite directive « Oiseaux », concernant la conservation des oiseaux sauvages, modifiée dernièrement par la directive 2008/102/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 et la Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 ; Cette directive propose la conservation à long terme des espèces d’oiseaux sauvages de l’Union européenne en ciblant 181 espèces et sous-espèces menacées qui nécessitent une attention particulière.
Sur la base de ces deux directives, chaque pays est tenu de désigner des Zones Spéciales de Conservation (ZSC) pour la préservation des habitats, de la faune et de la flore et des Zones de Protection Spéciale (ZPS) pour la préservation des oiseaux sauvages. Une section particulière à la désignation et à la gestion de ces sites Natura 2000 est définie dans le Code de l’environnement français (art L. 414.1 à L. 414.7).
concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ; elle établit un cadre pour les actions communautaires de conservation d’espèces de faune et de flore sauvages ainsi que de leur habitat. Cette directive répertorie plus de 200 types d’habitats naturels, 200 espèces animales et 500 espèces végétales présentant un intérêt communautaire et nécessitant une protection. Directive 79/409/CEE du Conseil du 2 avril 1979 dite directive « Oiseaux », concernant la conservation des oiseaux sauvages, modifiée dernièrement par la directive 2008/102/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 et la Directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 ; Cette directive propose la conservation à long terme des espèces d’oiseaux sauvages de l’Union européenne en ciblant 181 espèces et sous-espèces menacées qui nécessitent une attention particulière.
Sur la base de ces deux directives, chaque pays est tenu de désigner des Zones Spéciales de Conservation (ZSC) pour la préservation des habitats, de la faune et de la flore et des Zones de Protection Spéciale (ZPS) pour la préservation des oiseaux sauvages. Une section particulière à la désignation et à la gestion de ces sites Natura 2000 est définie dans le Code de l’environnement français (art L. 414.1 à L. 414.7).
L’article 6 de la directive « Habitats / faune / flore » introduit deux modalités principales et complémentaires pour la gestion courante des sites Natura 2000 :
La mise en place d’une gestion conservatoire du patrimoine naturel d’intérêt européen à l’origine de leur désignation définie par un DOCOB.
La mise en place d’un régime d’évaluation des incidences de toute intervention sur le milieu susceptible d’avoir un effet dommageable sur le patrimoine naturel d’intérêt européen à l’origine de la désignation de ces sites et plus globalement sur l’intégrité de ces sites.
La seconde disposition est traduite en droit français dans les articles L414-4 & 5 puis R414-19 à 26 du code de l’environnement. Elle prévoit la réalisation d’une « évaluation des incidences Natura 2000 » pour les plans, programmes, projets, manifestations ou interventions inscrits sur :
Une liste nationale d’application directe, relative à des activités déjà soumises à un encadrement administratif et s’appliquant selon les cas sur l’ensemble du territoire national ou uniquement en sites Natura 2000 (cf. articles L414-4 III et R414-19) ;
Une première liste locale portant sur des activités déjà soumises à autorisation administrative, complémentaire de la précédente et s’appliquant dans le périmètre d’un ou plusieurs sites Natura 2000 ou sur tout ou partie d’un territoire départemental ou d’un espace marin (cf. articles L414-4 III, IV, R414-20 et arrêtés préfectoraux en cours de parution en 2011) ;
Une seconde liste locale, complémentaire des précédentes, qui porte sur des activités non soumises à un régime d’encadrement administratif (régime d’autorisation propre à Natura 2000 – cf. article L414-4 IV, articles R414-27 à 29 et arrêtés préfectoraux à paraître suite aux précédents)
La mise en place d’une gestion conservatoire du patrimoine naturel d’intérêt européen à l’origine de leur désignation définie par un DOCOB.
La mise en place d’un régime d’évaluation des incidences de toute intervention sur le milieu susceptible d’avoir un effet dommageable sur le patrimoine naturel d’intérêt européen à l’origine de la désignation de ces sites et plus globalement sur l’intégrité de ces sites.
La seconde disposition est traduite en droit français dans les articles L414-4 & 5 puis R414-19 à 26 du code de l’environnement. Elle prévoit la réalisation d’une « évaluation des incidences Natura 2000 » pour les plans, programmes, projets, manifestations ou interventions inscrits sur :
Une liste nationale d’application directe, relative à des activités déjà soumises à un encadrement administratif et s’appliquant selon les cas sur l’ensemble du territoire national ou uniquement en sites Natura 2000 (cf. articles L414-4 III et R414-19) ;
Une première liste locale portant sur des activités déjà soumises à autorisation administrative, complémentaire de la précédente et s’appliquant dans le périmètre d’un ou plusieurs sites Natura 2000 ou sur tout ou partie d’un territoire départemental ou d’un espace marin (cf. articles L414-4 III, IV, R414-20 et arrêtés préfectoraux en cours de parution en 2011) ;
Une seconde liste locale, complémentaire des précédentes, qui porte sur des activités non soumises à un régime d’encadrement administratif (régime d’autorisation propre à Natura 2000 – cf. article L414-4 IV, articles R414-27 à 29 et arrêtés préfectoraux à paraître suite aux précédents)
Art L414- 4
I. – Lorsqu’ils sont susceptibles d’affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l’objet d’une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après » Evaluation des incidences Natura 2000 «


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Ce n’est pas une forêt mais une peupleraie…
Si, d’après le diagnostic environnemental effectué par un spécialiste conservateur d’une forêt inscrite au patrimoine mondial depuis les années 1970, il ne s’agissait plus d’une peupleraie mais bien d’une forêt mixte. Je cite « la désignation cadastrale de « plantation » seule ne tient pas au constat réalisé sur place avec la présence de nombreuses espèces spontanées comme le chêne, les saules, les ormes et nombreuses autres essences présentes. La photo illustrant les coupes sur la pétition mise en ligne est tout à fait explicite sur ce point et montre clairement des boisements mixtes et diversifiés. On n’est donc pas sous le coup des autorisations possibles pour une plantation exclusive de peupliers mais bien en partie dans des boisements mixtes qui ont prévalu à la désignation d’une ZNIEFF, d’une ZPS et d’une ZSC (Natura 2000 »
Voyez ici : https://bureau122.fr/2025/07/19/en-complement-de-la-petition-halte-au-massacre-de-la-foret-des-iles-de-bonny-sur-loire-par-joseph-garrigues/